Affaire Seznec : La piste de Lormaye

Pierre Quémeneur a-t-il été assassiné par Guillaume Seznec à Lormaye ?

Affaire Seznec : un beauf peut en cacher un autre...

 

 

 

 

 

 

"Jamais le soleil ne voit l'ombre"

Léonard de Vinci

 

 

 

 

Dans cette histoire embrouillée, que Cabu lui-même aurait pu illustrer, on a fait beaucoup d'honneur à un personnage clé de l'affaire : Jean Pouliquen. On ne sait pas vraiment ce qu'il a fait ou non, d'ailleurs, mais il y a un autre beauf dont on ne trouve pas même la photo, et, qui, pourtant n'a pas donné sa part au chat...

 

Je tente de vous parler juste là de l'ami Emile Petitcolas.

 

On va résumer en disant que si l'un a tout fait pour couler Guillaume, l'autre a tout fait pour le ramener sur la berge !

 

 

 

 

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Alors on y va pour lire du Bernez Rouz, en page 143 :

 

"Par ailleurs, le beau-frère de Seznec, Emile Petitcolas, franc-maçon, est journaliste, ancien rédacteur au journal La Dépêche de Brest. Il devient rédacteur en chef du journal républicain L'Eclaireur du Finistère, organe du parti radical-socialiste, en août 1923. De plus, il est correspondant du Temps. Marié à Marianne, soeur de Guillaume Seznec (NDLR Vous remarquerez que les soeurs portent le même prénom, ce qui n'a d'ailleurs aucune importance pour l'affaire), Emile Petitcolas, qui meurt en janvier 1928, défendra bec et ongles, Guillaume Seznec. C'est d'ailleurs lui qui devient le tuteur de Joseph-Guillaume Seznec par délibération du conseil de famille en date du 11 mars 1925. Il intervient à ce titre lors de la vente de la propriété des Seznec dite Au Prieuré, qu'ils avaient achetée le 2 février 1918 (NDLR Ne me demandez pas comment les Seznec ont pu s'acheter cette propriété et le matériel nécessaire à la scierie, je n'en ai strictement aucune idée ! Mais les archives finiront bien par parler, isn't it ?) Seznec est toujours défendu par le journal radical de son beau-frère."

 

A la lecture de Bernez, on se dit immédiatement : ce beau-frère-là, c'est quand même la classe ! Non seulement il doit avoir un carnet d'adresses épais comme le bottin du Finistère, mais en plus, lui, ce n'est pas l'appât du gain qui le motive, mais la défense de sa belle-soeur et de ses loupiaux.

 

Après une deuxième lecture, on se dit que côté "réseaux", Twitter et Facebook ne lui ont pas manqué car il n'était pas en manque Emile ! Il fréquentait la franc-maçonnerie. Les rad-soc. Les journalistes. Et la bonne bourgeoisie brestoise, of course.

 

 

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Sérieux, Le Temps, très sérieux, ce journal, ancêtre du journal "Le Monde". Cliquer sur : link

 

 

 

Où vous pourrez lire la condamnation de Guillaume Seznec en page 3 du numéro daté du 5/11/1924 :

 

 

 




Toutes ces recherches pour vous dire qu'Emile Petitcolas avait un pied dans le Finistère, mais aussi un pied à ... Paris. Ce qui facilite les démarches, quelles qu'elles soient.


Bernez Rouz nous le signale aimablement en page 144 : "Le 13 février 1924, Marie-Jeanne Seznec adresse à la presse une longue lettre pour plaider la neutralité politique de son mari" Mais il s'empresse de nous préciser dans la note 297 en bas de page :

"Cité par Bernède Arthur, Seznec a-t-il assassiné ?, Editions Tallandier, Paris, p. 135. Il est peu probable que ce courrier soit de la main de Marie-Jeanne Seznec. Il faudrait plutôt y voir l'aide d'Emile Petitcolas. Il intervient plusieurs fois lors de l'affaire pour les demandes en révision.  Cf. Seznec Denis, op. cit., p.244."

Pour les fanatiques de l'exactitude, je rappelle que l'ouvrage de Bernède est consultable directement dans : Bibliographie et filmographie
On peut toutefois lire cette lettre ici : link

Emile Petitcolas, nous le retrouvons correspondant avec Me Kahn (oui, oui, je l'ai déjà dit pour Lormaye....) en page 292 de Denis Seznec, note 1, bas de page :

"Je trouve extraordinaire, écrit Petitcolas à Me Kahn le 14 mai 1926 - et je ne suis pas le seul de cet avis -, que les mêmes commissaires et inspecteurs de police, dont le rôle est tout de passion, pour rester dans les termes diplomatiques, soient chargés d'une contre-enquête sur l'enquête qu'ils ont faite. Ils s'enquêtent eux-mêmes ! Le résultat est certain : c'est la négation de l'enquête."

Et puis, pour finir, laissons la parole à Guillaume Seznec chez Denis Langlois en pages 236/237 :


"Dans ta grisaille et dans ton froid, tu avais eu un réconfort. Tu avais appris que ton beau-frère Petitcolas, le second mari de ta soeur Marianne, était depuis le début à tes côtés. Jusque-là, tu l'avais ignoré. Pour d'obscures histoires de famille, vous ne vous fréquentiez plus. Il avait longtemps vécu à Brest, puis s'était installé à Morlaix où il était devenu le rédacteur en chef de L'Eclaireur du Finistère et le correspondant d'un journal parisien, Le Temps. Compte tenu de vos liens familiaux, il n'avait pu se charger du compte rendu de l'affaire, mais il avait tout fait pour que les attaques ne soient pas trop virulentes, pour qu'on se contente de rapporter les faits. Aujourd'hui, il se sentait plus libre, et multipliait les démarches, recherchant les faits nouveaux, écrivant aux ministères, se servant de ses relations franc-maçonniques. Car, en fait, c'était cela qui vous avait opposés. Tu étais un croyant à toute épreuve et lui ne croyait en rien, sauf aux hommes. Ses discours sceptiques et ironiques sur l'existence de Dieu t'avaient horrifié. Tes enfants écoutaient. S'ils se laissaient tenter, c'était pour eux la damnation. Tu avais préféré espacer les visites et les réduire finalement à leur plus simple expression. Marie-Jeanne qui n'aimait pas beaucoup ta famille n'avait rien fait pour arranger les choses. Il te restait un regret, celui de ne pouvoir rendre visite à ta soeur qu'à la sauvette ; celui aussi de ne pouvoir discuter avec Petitcolas. Il était dans l'erreur, c'était sûr, mais ce n'était pas un mauvais homme. Plutôt meilleur que la majorité des habitués de l'église que tu connaissais. Il n'aimait pas médire sur les autres et c'était déjà un avantage. Il pensait que les guerres n'étaient pas une fatalité, en tout cas pas un fléau envoyé par Dieu pour éprouver les hommes. C'était là un raisonnement qui ne te déplaisait pas, mais tu t'empressais de répliquer que, si Dieu le permettait, c'est qu'il l'estimait nécessaire pour la rédemption de l'humanité. Petitcolas riait. Tu te sentais un peu ridicule d'employer de grandes phrases.
Le rapprochement avec Petitcolas, c'était bien la seule chose positive que t'avait apportée ce drame. Il était probable que cela ne servirait à rien, mais tu étais heureux que Marie-Jeanne ne soit pas tout à
fait seule, que les restes de ta famille se resserrent autour d'elle.
Brusquement tu t'étais demandé : "Mais au fait comment s'appelle-t-il ?" Il t'avait fallu faire un effort pour te souvenir de son prénom : Emile. Longtemps encore, quand tu pensais à lui, tu l'avais appelé Petitcolas ou même Petitchocolat comme disaient tes enfants. Et puis un jour, naturellement, Emile était venu sur tes lèvres. Tu avais compris que vous étiez réconcilié."


On parle beaucoup de Jean Pouliquen quand on évoque l'affaire Seznec. Et il est quasi certain que le notaire, pour une question d'argent, n'a pas hésité à enfoncer Guillaume. On ne parle pas du tout (ou si peu) d'Emile Petitcolas qui, lui, a joué un rôle primordial pour la réhabiltation de son beau-frère. Dès la sentence prononcée. C'est ainsi, les hommes de l'ombre sont souvent peu reconnus. A moins que...


Liliane Langellier

http://julie.prat.pagesperso-orange.fr/beauf1.gif Un beauf échappé de Cabu


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