Affaire Seznec : La piste de Lormaye

Pierre Quémeneur a-t-il été assassiné par Guillaume Seznec à Lormaye ?

Affaire Seznec : la piste de Lormaye : une piste de diversion ?

 

 

 

 

 

 

« Quand le sage désigne la lune,

l’idiot regarde le doigt. »

Proverbe chinois

 

  La-marionnette-est-immobile.jpg

 

 

 

 

Je m'explique. Comme certaines marionnettes, la piste de Lormaye ne tient plus que par deux fils :

 

- la consultation, aux archives, du journal "Le Quotidien" (1926 ? 1928 ? Les deux ?)

- la vérification, sur le terrain, des dires de Madame Facq.

 

J'en profite pour le rappeler ici, Madame Facq n'a pas fait ce que l'on appelle "un témoignage légal". Elle est venue spécialement en parler à Denis Seznec. Le 26 septembre 2003. Qui m'a appelée illico presto. Elle a renouvelé son témoignage devant moi. Mais aucun écrit dûment signé à la gendarmerie n'est là pour légaliser ses dires. Si l'on prend toutefois pour référence une affaire qui tient actuellement en haleine tous les medias, il suffirait "de le dire à Untel", pour que le dit Untel soit entendu par la Justice. Si une plainte, qui passait par là, venait à pointer son joli nez.

 

Et puis deux fils n'ont jamais empêché une marionnette de continuer son spectacle. Pour la plus grand joie des enfants.

 

Quant à moi, c'est au fil des articles de ce blog, qui fêtera son premier anniversaire le 18 août prochain, que s'est développée ma réflexion. J'avais refusé l'édition d'un livre. Jugeant un blog moins figé, car j'attendais encore des témoignages. Dites-vous bien que, côté diversion, le temps, passé par les medias et les hommes de loi sur la piste de Lormaye, aura été du temps en moins pour investiguer en urgence sur les lieux Seznec et Quemeneur du Finistère : Brest, Morlaix, Plomodiern, Landerneau, Châteaulin, Pont-l'Abbé, etc...

 

riec-sur-belon

 

 

 

Récapitulons.

 

1.- La piste de Lormaye constitue "le fait nouveau" nécessaire à la demande d'une deuxième révision

 

En préambule, il est évident que Marie-Jeanne Seznec a effectué toutes ses démarches à Chartres de bonne foi. En 1928, c'est une femme douloureuse. Pauvre. Qui ne veut pas perdre espoir. Mais qui vient déjà de vivre le refus de la première demande de révision (1926). Cette demande de révision concernait l'existence réelle de Boudjema Gherdi. Denis Seznec nous explique le point de départ : une lettre de Guillaume à Marie-Jeanne, venant de Saint-Martin-de-Ré (page 299 de "Nous, les Seznec, édition 2006) :

 

SEZNEC PAR SEZNEC

 

"Dans une lettre que mon grand-père adresse le 16 août 1925 à Marie-Jeanne, on peut lire le passage suivant

.... Je suis absolument sûr que Cherdy  existe ou du moins existait à Paris, et je puis le prouver, ce que la police n'a jamais pu ou du moins n'a pas voulu découvrir. Ce dernier a même tenu Garage automobile dans cette ville et pour connaître son adresse il suffirait de s'adresser dans un café sous l'enseigne Au Tambour boulevard ou avenue Bourdenet Paris. Ce serait, paraît-il plutôt un Mexicain qu'un Américain mais cela n'a pas d'importance, il pourrait peut-être faire jaillir quelques éclaircissements."

 

Bien que l'on puisse se demander pourquoi Guillaume n'en a pas parlé plus tôt, cela représentait un fait nouveau et d'importance. Car il aurait pu lui éviter la déportation au bagne. Il concernait l'existence de Gherdi, à Paris, et, sa fréquentation du Café "Au Tambour". Pas le Finistère. Etrangement, et c'est important car l'affaire Seznec, jusqu'à aujourd'hui, a toujours fonctionné de la sorte, ce sont les journalistes qui "jouent les Rouletabille" et se font l'écho dans leurs différents journaux (Le Matin, Le Petit Parisien, etc..) de cette première demande de révision datée du 6 avril 1926. Denis Seznec écrit encore en page 303 :

 

"Ma grand-mère est pleine d'espoir. D'autant plus que l'opinion publique commence à subodorer qu'elle a été trompée. Extrait d'une lettre de Petitcolas à Me Kahn (20 avril 1926) citant le rédacteur en chef de La Dépêche : "Il y a à l'heure actuelle un revirement complet de l'opinion en faveur de Seznec. La presse avait été complètement abusée par les notes tendancieuses de la police."

 

Les différents développements de la piste de Lormaye nous ont permis de connaître Maître Marcel Kahn. Ce n'est pas le cas d'Emile Petitcolas. Bernez Rouz, en page 143 de son ouvrage, écrit :

 

LIVRE ROUZ

 

"Par ailleurs, le beau-frère de Seznec, Emile Petitcolas, franc-maçon, est journaliste, ancien rédacteur au journal La Dépêche de Brest. Il devient rédacteur en chef du journal républicain L'Eclaireur du Finistère, organe du parti radical socialiste, en août 1923. De plus il est correspondant du Temps. Marié à Marianne, soeur de Guillaume Seznec, Emile Petitcolas, qui meurt en janvier 1928, défendra bec et ongles Guillaume Seznec. C'est d'ailleurs lui qui devient le tuteur de Joseph-Guillaume Seznec, par délibération du conseil de famille en date du 11 mars 1925. Il intervient à ce titre, lors de la vente de la propriété des Seznec dite Au Prieuré, qu'ils avaient achetée le 2 février 1918."

 

Et là, nous sommes juste comme Denis Seznec qui écrit, en page 296 :

 

"On découvre ainsi un nouveau personnage : Emile Petitcolas, le mari de Marianne, la soeur de mon grand-père. De sa présence auprès de ma grand-mère et de son action, les lettres en sont pleines."

 

C'est important de savoir que Marie-Jeanne Seznec n'est pas seule dans sa lutte opiniâtre. Mais secondée par Me Kahn et par son beau-frère Petitcolas. D'autant plus que cette première demande en révision est rejetée le 7 décembre 1926 et que Guillaume Seznec part pour le bagne de Guyane le 7 avril 1927.

 

C'est en re-lisant la chronologie de l'histoire Seznec, que je penche de plus en plus pour le premier trimestre de l'année 1928 en ce qui concerne les articles de Charles Huzo dans "Le Quotidien". Articles qui ont été cités et re-cités par Georges Viet.

 

Donc, années 1928 et 1929 : la piste de Lormaye. Avec deux commandants de bord officiels (pour les officieux, je ne sais pas faire tourner les guéridons) : Me Marcel Kahn et le journaliste Charles Huzo.

 

On commence à citer ouvertement l'intervention de la Ligue des Droits de l'Homme. Leur soutien avait commencé bien avant. Dès l'arrestation de Guilaume Seznec. Ainsi, dans l'ouvrage de Rieux Nédelec "Seznec innocent... ou prestigiditateur criminel", on peut lire en page 181 :

 

"La Ligue des Droits de l'Homme, à laquelle avait appartenu Emile Le Bras, rédacteur de L'Eclaireur du Fiinistère, jusqu'à sa mort en août 1923, apporta son appui sans réserve à l'action entreprise."

 

Denis Seznec écrit en page 275 de son ouvrage :

"Cette impression, une petite publication la ressent et l'exprime. C'est L'école émancipée, revue pédagogique hebdomadaire de la Fédération des syndicats de l'enseignement. Dans le numéro 8 daté du 16 novembre 1924, sous le titre JUSTICE ! Edouard Rothen écrit : "La condamnation de Seznec était prévue. Autour de la cour d'assises, l'atmosphère était à la mort. La population la réclamait en rigolant ; on n'a pas tous les jours le plaisir légitime de voir couper une tête.

Les jurés, qu'on avait empêchés de passer la Toussaint chez eux, étaient décidés à condamner, mais déception !... La tête ne tombera pas. Malgré la certitude, abritée d'une robe rouge, de l'avocat de la société - l'aimable société d'honnêtes gens qui rigolaient - les douze augures ont eu un doute. Car enfin, non seulement on ne sait si Seznec a tué, mais on ne sait même pas si quelqu'un a été tué !... Qui sait si Quemeneur n'était pas dans la salle à rigoler avec ses compatriotes !...

On apprendra peut-être, dans quelques années, ou après sa mort, que Seznec était innocent. Il n'en sera pas moins allé au bagne, mais quoi ? D'autres que lui y sont allés qui n'étaient pas coupables. Et ça n'a aucune importance, pourvu que la malignité publique soit satisfaite et que les magistrats aient de beaux avancements."

 

Ainsi la ligue de l'enseignement se positionne-t-elle très tôt, soit 12 jours après la condamnation de Guillaume.

 

GUILLAUME SEZNEC

Guillaume Seznec, à Kergleuchard, Plourin Ploudalmézeau

(Photo Paris Match du 6 août 1949)

 

 

Ce qui nous amène, en 1930, à Madame Marie-Françoise Bosser, institutrice, présidente locale de la L.D.H. Qui, suite aux disputes incessantes dans le foyer de Jeanne et de François Le Her (Kergleuchard) et aux menaces perpétuelles de Le Her de "revenir sur son témoignage", ira jusqu'à faire héberger Guillaume Seznec chez les Berthou, à Riec-sur-Belon d'octobre 1947 jusqu'au dimanche 3 octobre 1948 où François Le Her sera tué. La famille Berthou raccompagnera même Guillaume à Kergleuchard auprès de ses petits enfants et assistera à l'enterrement du gendre. Leur fille, Eliane, née en 1928, et habitant toujours Riec-sur-Belon, a correspondu, fin décembre 2009, avec l'un des passionnés de l'affaire Seznec.

 

Lire : L'affaire Seznec et la Ligue des Droits de l'Homme (L.D.H.)

 

Marie Seznec, la fille aînée, meurt en 1930. Marie-Jeanne  en 1931. C'est justement en 1931 que paraît le premier ouvrage publié sur l'affaire : celui de Maurice Privat. Et qu'entre en scène le juge Hervé. Avec la piste de Plourivo (Traou Nez) Côtes du Nord. Avait-on peur que Guillaume, après ces deux douloureuses épreuves, n'en vienne à parler ou à se suicider ?

 

 

Maurice Privat

 

Ce que je tente de prouver, c'est que l'affaire Seznec n'a pas connu "de creux" dans sa défense.

Lire sur ce blog : Bibliographie et filmographie

Journalistes, magistrats, instituteurs, ligue des Droits de l'Homme, ligue de l'enseignement, franc-maçonnerie, etc.... n'ont jamais cessé d'intervenir pour obtenir la révision du procès. Parfois de façon bien maladroite, il faut l'admettre. Mais tous ceux qui ont exploré les différentes hypothèses de la disparition de Pierre Quemeneur et publié des ouvrages n'ont pas été du tout concernés par des recherches dans le Finistère. Lieu de vie des deux acteurs principaux de la pièce. Si Bernez Rouz en parle dans son livre, du Finistère, c'est pour analyser les différentes pistes des autres - ce qui est remarquable - mais non pour nous donner une nouvelle piste. Le créneau est libre et reste donc à prendre...


 

 

LORMAYE LES ECOLES

Madame Clémence Doucet, épouse de Charles Doucet, y a enseigné.

 

 

2. De la manipulation de certains témoins

 

Mais oui, je l'ai déjà écrit, c'est ma récente visite aux archives départementales, le 7 juillet dernier, qui m'a permis de "réfléchir autrement". En ayant accès à certains documents que je n'avais jamais lus auparavant. Et qui ne sont accessibles que depuis "la nouvelle loi des 75 ans" de juillet 2008.

 

La piste de Lormaye reposait sur deux témoins : Pierre Patrice et Georges Viet.

 

LORMAYE LA POMPE

 

Pour ce qui est du témoignage de Pierre Patrice, lire Affaire Seznec : la piste de Lormaye : faux témoignage de Pierre Patrice

 

Pour ce qui est du témoignage de Georges Viet, je suis troublée mais beaucoup moins affirmative, lire Affaire Seznec : la piste de Lormaye : Charles Huzo et le témoin Georges Viet

 

Maintenant je suis certaine que la venue de Charles Huzo à Lormaye était télécommandée. Je n'ai toujours pas trouvé le numéro de L'Ere Nouvelle, où, selon Denis Seznec (page 328) :

 

"Huzot vient enquêter sur place et conclut dans L'Ere Nouvelle que Quemeneur a été attiré dans un guet-apens à Lormaye où on l'aurait assassiné. Il cite des noms de gens ayant intérêt à le faire disparaître, des membres de sa famille entre autres, un banquier de Paris et le fameux Quémin." Faut-il décrypter : son beau-frère Jean Pouliquen avec son frère Louis Quemeneur ? Et un banquier de la fameuse B.P.C. Banque Parisienne Coloniale ? Pour plus de renseignements sur cette banque, lire dans le blog de "L'Affaire Seznec revisitée" en cliquant sur link

 

Curieusement, d'ailleurs, Dans L'Action Républicaine, "la petite souris du palais", écrit, le mercredi 26 décembre 1928, que Pierre Patrice a été défendu par Me Marcel Kahn. Non ! Pierre Patrice a été défendu par Me Tony Truc. Et c'est bien Charles Huzo qui a été défendu par Me Kahn.

 

Pour plus d'informations, lire : Affaire Seznec : Lormaye : 1929 : Jugement du procès Quemin

 

Voilà. J'en suis là. Avec ma petite marionnette et ses deux fils. Il ne me reste plus qu'à.... ne pas décourager.

 

Liliane Langellier

 

SHADOK POMPEUR


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