15 Mai 2015
Si l'on en croit les écrits de Maître Denis Langlois (et, personnellement, c'est l'hypothèse que je trouve jusqu'ici la plus probable et la plus proche de la vérité), c'est Petit-Guillaume qui aurait tout vu. Et tout entendu.
De quoi être un peu perturbé, non ?
Et pour la vie entière....
Parce que, pour un petit garçon, l'image de la mère, c'est la première image de la femme.
On ne va prendre qu'un seul exemple, mais, qui, à lui seul met bien en place tous les enfants Seznec.
Une lettre de la soeur aînée....
Lettre de Marie à son petit frère Albert en date du 11 février 1930 :
"Mon bien aimé petit Albert,
Tes bonnes notes me font plaisir, je les enverrai encore à papa, car cela je suis sûre l'intéressera beaucoup. Cher petit frère, je sais bien que tu as beaucoup de chagrin, hélas ! je ne suis comme toi qu'une créature humaine et je n'ai pas d'ailes pour pouvoir voler jusqu'à toi, mais d'ici je compatis toujours à toutes tes peines comme je l'ai toujours fait par le passé. Ils sont donc bien méchants les élèves de St Michel ? puisqu'ils se plaisent ainsi à te faire de la peine, je comprends que tu ne veuilles plus y rester. Le mieux est de ne leur rien répondre, nous autres, nous sommes certains de l'innocence de papa peu importe si les autres le croient coupable, un jour viendra où tout sera dévoilé. Le temps passe vite et plusieurs ont déjà reçu leur sentence du Bon Dieu. Je ne sais pas si maman t'avait annoncé la mort du Procureur de Morlaix qui savait papa innocent et qui malgré tout a été si inhumain pour papa et pour nous pendant la cruelle affaire.
Maintenant tu as peur dis-tu d'écrire à Meur Belz ? Oh : Il est bien simple et il en sera touché car il nous aime réellement. Quand je suis allée lui faire mes adieux, ceci va t'étonner, il a pleuré en disant comme le Bon Dieu les protège et comme je les aime, son adresse tu n'as simplement qu'à mettre Meur Belz Avoué à Morlaix. Il est le seul avoué de ce nom, donc pas de crainte. Maman te laisse sans nouvelles pauvre petit comme le Bon Dieu t'aime bien pour t'éprouver ainsi. Rappelle-toi de ce trait de la Petite Thérèse que tu aimes tant : "Une journée sans souffrances est une journée perdue" Ceci est bien consolant n'est-ce pas, donc estime-toi heureux d'avoir quelque chose à offrir et à souffrir tous les jours pour Jésus. Quant à maman ne te fais pas de chagrin, je suis aussi sans nouvelles depuis mon départ mais je ne crois pas qu'elle soit tombée malade. Enfin prions cher petit frère c'est tout ce que nous pouvons faire. Continue de m'écrire n'importe où tu te trouveras car je reste toujours ta grande soeur et ta seconde maman, tu peux donc tout me dire. Il faudra supplier Maman de t'amener avec elle cet été ou du moins de te laisser venir avec marraine. Nous aimons bien le petit Albert au Carmel, mes Révérendes Mères surtout, elles s'intéressent beaucoup à toi.
As-tu reçu le petit paquet que Notre Mère avait fait expédier en même temps que la lettre ? Jeannette t'a envoyé la petite statue que je lui avais donnée à Lorient cela me fait plaisir, elle a vraiment bon coeur.La Mère Supérieure de Lorient t'a écrit, dis-tu, elle aussi t'aime bien, nous lui avons je crois fait une bonne impression lors de notre court séjour à La Providence ainsi qu'à Meur l'Aumônier qui me disait car je lui ai parlé de Guillaume, quand il viendra voir Jeanne, j'irai lui parler. Mais tu sais je ne suis plus trop à l'aise pour écrire à Jeannette car elle montre toutes ses lettres à l'Aumônier. Il l'aime beaucoup et ne voudrait pas la voir partir.
Cher petit frère j'aurai voulu t'en dire plus long mais je me suis prise un peu tard pour écrire et cette après-midi je vais voir le dentiste.
A une autre fois. Union de prières et de souffrances toujours !
Les Bonnes Mères t'embrassent et t'aiment beaucoup
Reçois de ta grande soeur les plus tendres baisers.
Marie
Dans ta prochaine lettre donne-moi des nouvelles de Guillaume."
Vous trouvez cette lettre dégoulinante de bons sentiments ???
Et bien pas du tout.
Plusieurs points m'ont choquée.
Et j'ai souvent correspondu avec des Religieuses.
1/ La vengeance :
Le Bon Dieu vient se mêler de l'affaire Seznec et nous punit le procureur Théodore Picard.
La jeune Marie a bien mal assimilé l'Evangile (ou a séché des cours ???) car s'il est un commandement, c'est bien celui-là, que l'on soit bonne soeur ou laïc :
"Mais moi, je vous dis: Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent,"
en Matthieu 5,44.
2/ Le manque de compassion pour sa mère
Pas une seule ligne pour dire à son petit frangin de prier pour leur mère qui a dû se placer comme bonniche à Paris, ça la gêne pas trop l'apprentie religieuse ????
C'est vrai que si l'on en croit Claude Sylvane, Marie n'a passé que 24 heures auprès de sa mère pour venir lui dire adieu avant de partir au couvent. Trois jours auprès de Jeanne à Lorient. Et un mois chez sa marraine Petitcolas. Cherchez l'erreur...
Elle a encore du pain sur la planche l'apprentie bonne soeur pour atteindre la sainteté....
Quant à prévoir l'été 1930, elle ne le verra hélas jamais puisqu'elle meurt tout début août.
Je le répète encore parce que c'est nécessaire : Marie a dû attendre sa majorité, soit ses 21 ans, donc le 1er novembre 1929 pour entrer comme "novice" au Carmel (on cherche toujours Haumont...).
La lettre date de février 1930...
Elle n'a pas encore eu le temps d'être seulement admise à prononcer des voeux temporaires.
Quant à Jeannette, elle se tire ailleurs juste un mois avant la mort de sa chère maman.
De qui se moque-t-on là ?
Parce que la maladie de Marie-Jeanne il fallait être atteinte de cécité pour ne pas la voir.
Il n'y a qu'Albert qui soit près de sa mère lorsqu'elle passe. Et qui assiste aux obsèques.
Guillaume est en mer, et là, ce n'est pas une excuse bidon.
Mais la Jeannette, elle ne pouvait pas rappliquer illico pour l'enterrement ? On sait que ça existait les télégrammes puisque dans cette affaire ils n'arrêtent pas de s'en envoyer...
3/ L'aumônier et Jeannette
C'est quoi cette histoire d'aumônier ????
Pourquoi ne pourrait-il pas lire les lettres qu'une future religieuse écrit à sa soeur ????
4/ Petit-Guillaume
Il se tient au large, si je puis dire.
Et on ne peut pas lui donner tort.
En clair et non crypté, Marie-Jeanne est absente des prières de sa fille future religieuse.
Elle n'a pas non plus Jeanne en odeur de sainteté.
Restent les deux frères qui trouvent quelque grâce à ses yeux.
Entre nous soit dit, cette lettre-là ne pourrait pas être affichée dans les couvents comme modèle de piété.
Entre nous soit dit....
Liliane Langellier