14 Mars 2015
"Exige beaucoup de toi-même et attends peu des autres. Ainsi beaucoup d'ennuis te seront épargnés."
Confucius
J'ai quand même l'impression que certains n'ont pas très bien compris ce qui a poussé Madame Bataille à écrire ses cahiers....
Primo, dites-vous bien que de se mêler de l'affaire Seznec, c'est plus une source d'emmerdes que de bénédictions !
Secundo : quand sa soeur aînée suggère à Mme Bataille de faire parvenir son témoignage AU petit-fils. Car c'est Denis et personne d'autres. Elle lui suggère en même temps de les mettre par écrit.
Nous sommes l'été 1977.
La radio a annoncé que Me Denis Langlois allait déposer une énième demande de révision.
Madame Clydia Bataille a deux problèmes :
- comment joindre le petit-fils (car c'est bien à lui et à lui seul que Guillaume a demandé que soit rapportée leur conversation).
Petit rappel : nous sommes en 1977, les réseaux sociaux n'existent pas. Et les deux médias principaux sont la radio et les journaux.
- et sous quelle forme ?
Elle va opter pour des cahiers 31 H x 23 L qu'elle va devoir recopier car elle souhaite en garder un double.
Madame Bataille n'est ni écrivain ni journaliste.
Elle n'a pas de facilités d'écriture. Et elle souhaite tout restituer en bon ordre au petit-fils...
Enfin tout ça nous mène largement au printemps 1978.
C'est en septembre 1978 que Pierre Bellemare annonce qu'il envisage une série d'émissions sur l'affaire Seznec....
Vous savez avec quelle amabilité Petit-Fils premier a débouté cette femme au téléphone, lors des émissions de janvier 1979...
Bien sûr qu'elle a attendu que Kléber Augereau et Guillaume Seznec aient fermé les yeux. Elle leur avait promis.
Mais je le rappelle encore et encore : la plus virulente était bien Madame Augereau. Qui ne passera ad patres que l'été 1985 !
Oui, je la défends.
Parce que oui, contrairement à ce que je vois et j'entends actuellement, elle n'a pas cherché à se médiatiser. Elle n'a pas voulu occuper le devant de la scène. Elle était sérieuse. Elle a juste voulu honorer une promesse faite aux deux zigs.
Après....
Et bien après, vous pouvez vous moquer...
Croire ou ne pas croire ce qu'elle a écrit...
Cela m'est bien égal. Ce qui compte, pour moi, c'est de retranscrire ce qu'elle a écrit.
Elle n'avait pas d'apparitions comme le juge Hervé, elle ne faisait pas tourner les guéridons ni écrire les esprits sur ses cahiers pendant la nuit après leur avoir posé des questions...
Elle était "normale" et bien dans ses babouches.
Une espèce en voie d'extinction, quoi....
Mais revenons donc à ce curieux début d'année à Lencloître.
Année 1949.
Jour de l'an et jours suivants.....
Lundi (3 janvier)
- Patronne me dit le soir :
- Si mon mari a besoin de marchandises en réserve, il ira les chercher lui-même. Je ne veux pas vous y voir monter....
- Bien Madame.
- L'après-midi Patron mit une vieille blouse de travail et muni d'un petit pot d'huile et d'un pinceau en riant me dit
- Je vais graisser les serrures par ce froid, ce ne serait pas un mal, j'en ai pour une heure.
Il continuait à me mettre au courant de ce qu'il faisait.
Mardi (4 janvier)
Après le courrier, le patron prend le téléphone et demande une communication... dans l'appel il donne les mesures du meuble - hauteur - largeur - longueur et des explications diverses... Mais ne prononça pas de Nom...
Mercredi (5 janvier)
- Nouvel appel au téléphone avec beaucoup de détails et mesures du meuble... La communication dure plus d'un quart d'heure...
Jeudi (6 janvier)
- Patronne met un trousseau de clefs sur les marches de l'escalier cuisine et me dit :
- Ne touchez pas ces clefs j'en ai besoin. Je les mets à ma portée de mains.
- A chaque fois qu'elle fait accès à l'escalier, elle vérifie les clefs ... Les compte... Ce qui a pour but de m'énerver et de me faire rire mais je ne dis rien.
Vendredi (7 janvier)
- Vers 18 heures un coup de téléphone. Patronne répond, sitôt après va ouvrir les grandes portes cour.
- Vers 19 heures une voiture rentre en reculant dans la cour juste à la base de l'escalier cour s'arrête.
- Patron sort du magasin par la porte cour et va fermer les grandes portes, puis revient près de sa femme à la porte véranda chercher les clefs, va au garage, prends deux petits cartons "préparés du matin" puis au pied de l'escalier dit bonjour à Guillaume puis au chauffeur qui viennent juste de sortir de la voiture.
- Patronne arrive et dit bonjour à son tour à Guillaume puis au chauffeur.
- Patron monte l'escalier suivi de Guillaume.
- Le chauffeur ouvre l'arrière de la voiture, une porte vers le haut, une vers le bas à l'horizontal et monte l'escalier.
- Patronne va faire le tour de la voiture pour approcher deux colis de la voiture et monte quatre à cinq marches, redescend, va chercher un carton au garage.
- Au milieu de l'escalier, Patron sort un petit paquet de sa poche gauche et le donne à Guillaume et ouvre la porte de la réserve avec ses clefs, du temps de quelques secondes, Guillaume se retourne et me voit dans la cuisine et me fait un "bonjour de la main". Je lui réponds car je l'ai bien reconnu.
- Patronne avait allumé la lampe située juste au-dessus de l'escalier.
- Le chauffeur est une personne moins grande et plus trapue que Guillaume.
- Patronne monte l'escalier avec un grand carton apparemment vide.
Quelques minutes plus tard.....
- Le chauffeur de la voiture redescend en tenant la poignée d'une malle (assez grande puisque celle-ci reposait sur trois marches). Avec précaution effectue la descente, marche après marche, aidé par Guillaume. Vient ensuite le patron avec ses deux cartons, la Patronne avec son grand carton,
- Etant au courant de ces déplacements, j'observe tout... Guillaume ne m'avait-il pas dit "Souvenez-vous de moi pour plus tard"...
- Arrivé au bas de l'escalier le chauffeur met la malle dans la voiture il y a comme une niche à bagages. En mettant la malle dans cette niche (dans le sens de la longueur de la voiture) elle n'était pas d'aplomb. Patron dit :
- J'ai pourtant bien pris les mesures.
- Après un léger calage, tout fut en ordre un carton à droite , un carton à gauche, fermeture du bas. Le grand carton dessus... Et ensuite fermeture de la porte haut. Vérification.
- Là je vois les numéros, je ne peux les inscrire mais je les apprends par coeur pour me rappeler "on verra bien"...
- Au pied de l'escalier tous quatre discutent environ cinq à dix minutes pas plus...
- Guillaume regarde l'heure à sa montre...
- Deux autres cartons sont mis à l'intérieur par la porte arrière, je pense à des colis de linge...
- Au revoir, une poignée de mains les uns les autres.
- Le patron va ouvrir les grandes portes, dès que Guillaume et le chauffeur sont prêts... Adieu... Un signe de la main... La voiture s'en va... Patron referme les portes, éteint la lumière...
- Tous deux ; les bras ballants, leurs êtres vidés d'une certaine inquiétude, tous deux effectuent à pas lents les quelques mètres qui les séparent de moi ... Pas un mot mais une grande lassitude imprègne leurs gestes et l'atmosphère...
- Pour rompre ce silence, je me mis à mettre le couvert pour le repas du soir. J'étais en avance sur l'horaire mais ça ne faisait rien. Je faisais du bruit. J'avais hâte que le repas soit terminé pour laisser mes patrons seuls... libres de discuter sans ma présence.
- Patronne me dit : puisque vous avez mis le couvert, et bien soupons tout de suite.
- Le repas fut vite terminé... et je ne mis pas longtemps à faire la vaisselle, il était environ 20 heures, un peu plus peut-être, que je me retrouvais dans ma chambre.
- J'étais un peu contrariée d'être restée là, ou obligée d'être là. Je ne m'attendais pas en venant dans ce village, dans ce foyer, à connaître de tels événements. Je réfléchissais, je voulais partir de ce foyer ... Mais j'avais donné ma parole que je resterais près d'eux jusqu'au déménagement... Après, là-bas, il y avait d'autre personnel.
Puis je repensais à ce dimanche, cette confiance de ces deux hommes, leurs confidences... Là, je pris un crayon à papier et j'écrivis au fond de ma valise les numéros de la voiture - pour me rappeler - car inscrits je ne risque pas de perdre les notes. Et puis cela ne donnera aucun indice à personne cette lecture, sinon qu'à moi-même.
- Il me semble qu'à ce jour Patron n'avait toujours pas dit à sa femme que je connaissais leurs activités familiales, parce que Patronne se serait méfiée et m'aurait envoyée au magasin."
Voilà.
La malle est repartie.
Personne ne peut jurer si elle était vraiment venue, ni pour où elle est repartie.
C'est pour cette raison que j'aurais aimé rencontrer Madame Clydia Bataille.
Si elle vit toujours.
Ou sa descendance.
Remettez-vous juste en mémoire la phrase du livre de Me Denis Langlois, après l'avoir rencontrée, flanqué des deux petits-fils, le 17 janvier 1986 :
" Les frères Le Her et moi, nous repartons perplexes."
Liliane Langellier
P.S. IMPORTANT
Dimanche 15 mars 2015, 20 heures.
Je viens de parler avec Madame Eliane Berthou. Dont les parents tenaient la ferme de Rudéval. Où Guillaume Seznec a séjourné d'octobre 1947 à début octobre 1948.
Pour le coup, c'est moi qui suis perplexe...
Pour elle, il n'y a jamais eu de puits perdu construit à la ferme.
Je m'explique.
Le père Guillaume était nourri et logé chez les Berthou, des amis de Mme Bosser.
C'était une grande ferme où tout le monde mangeait à la même table aux trois repas : petit déjeuner, déjeuner, et dîner. Comme ici en Beauce. Le patron en bout de table et les commis et la famille des deux côtés de la table.
C'est la grand-mère qui faisait à manger pour tout le monde.
A Rudéval, il y avait Monsieur et Madame Berthou, la grand-mère, la fille Eliane, son frère, deux commis et le père Guillaume.
Le père Guillaume logeait chez la grand-mère - qui avait deux pièces dans une partie de la grande maison - La grand mère logeait au premier étage et Guillaume au rez-de-chaussée.
On peut facilement imaginer que la grand-mère aurait entendu le père Guillaume se lever à trois heures du matin pour aller construire son trou...
Il n'a jamais construit d'évier pour aménager son lieu de vie.
Il n'y a d'ailleurs pas d'évier à cet endroit.
Il ne faisait pas non plus sa cuisine tout seul puisqu'il était nourri et logé.
Pour l'occuper, comme il savait travailler le bois, les Berthou lui ont donné à construire des clayettes pour mettre les pommes de terre...
Il a fait des meubles... Il bricolait.
Il aidait aussi pour presser les pommes car les Berthou faisaient commerce de cidre. Il est allé parfois livrer du cidre avec Mme Berthou à Pont-Aven et à Bannalec.
Pour travailler, il allait dans la grange où se tenait M. Berthou.
Il ne s'absentait pas.
Il ne conduisait pas de voiture.
C'est bien Eliane Berthou, avec son frère, qui ont reconduit Guillaume Seznec à Plourin Ploudalmézeau juste après l'assassinat de François Le Her tout début octobre 1948.
Mme Berthou n'a jamais vu ni entendu parler de puits perdu...
Ni de fouilles de Bernard Le Her.
Par contre, elle a rencontré, peu de jours avant la mort de Le Her, Emilien Florent, l'homme qui fut témoin de l'assassinat de Le Her.
Il descendait du car en même temps qu'elle un certain soir (fin septembre ?) à Riec-sur-Belon, et il avait pris le chemin de Rudéval (3 kilomètres). Au moment où la route devient une côte, il lui demanda de lui confirmer qu'il était sur la bonne route.
Selon elle, la compagne d'Emilien Florent, Lydia Olliveau était une cartomancienne, amie de Jeanne Le Her (qui avait recours à tout ce style de "paranormal" : tirages de cartes, recherches aux pendules, etc...)
Emilien Florent va passer toute la nuit à parler avec Guillaume Seznec.
Ce que nous confirme, à sa façon, Denis Seznec, dans son livre en page 389 (édition 2006) :
"Pendant cette période - ce sont les Berthou qui me l'apprendront plus de vingt années plus tard - l'homme ira à Riec-sur -Belon pour essayer, en vain, de convaincre mon grand-père de revenir habiter chez son gendre mais en lui suggérant d'acheter auparavant un fusil "pour se défendre"."
Denis Seznec l'écrit déjà dans la toute première édition de son livre, à l'automne 1992, en page 316.
Ce n'est donc nullement un scoop !!!
J'en ai d'ailleurs parlé sur ce blog le 21 août 2012, dans un article titré : "Le huis clos de la mort de François Le Her" !
Madame Berthou, comme moi, avait été jointe par Ernest Godoc le Brestois. Qu'elle a même rencontré. Et avec qui elle était en correspondance.
Et, comme moi, elle a essuyé une violente colère de Denis Seznec lorsque ce dernier l'a appris. Elle n'a plus aucun contact avec lui.
En effet, Denis Seznec a cessé, de lui-même, toute relation avec elle en 2006.
Et, là, revient la même question lancinante :
"Mais que Godoc savait-il donc (avait-il donc appris ?) qui dérange tant Denis Seznec ?"
à suivre...